Le physicien Etienne Klein en masterclass au CFJ !
Jeudi 21 janvier, le physicien Etienne Klein a rencontré les étudiants du CFJ et de l’école W, dans le cadre d’une master class dédiée à la vulgarisation scientifique. Physicien et philosophe des sciences, le présentateur de l’émission « La conversation scientifique » de France Culture s’est questionné avec eux sur la question de l’opinion et de la vérité scientifique et sur les devoirs du journaliste à l’heure de l’information rapide, du numérique et de la pandémie mondiale de la Covid 19.
Entre complotisme, fake news et croyances, comment faire pour que l’opinion ne prenne pas le dessus sur la vérité scientifique? Etienne Klein a abordé cette problématique particulièrement d’actualité à l’heure de la pandémie mondiale de la Covid-19.
« On a demandé à la science de se ranger sous la coupe de l’opinion. La science elle-même est remise en doute par la toute puissante ‘’opinion publique’’. D’où vient donc ce phénomène qui semble s’attaquer à l’idée même de la vérité ? Comment se fait-il que nous ayons une telle promptitude à nous déclarer expert de ce que nous ne connaissons pas ? ». Un avis doit pouvoir se forger : « Il faut s’informer, se questionner, travailler…c’est un vrai travail de forgeron ». Et ce travail ne peut pas s’accomplir sans l’aide des journalistes. Car selon lui, la science n’est pas démocratisable, dans le sens ou le vote n’est pas un facteur déterminant des conclusions qu’elle apporte, mais républicaine : elle doit pouvoir se propager au sein de la société sans subir le joug de l’opinion. »
Etienne Klein s’est aussi questionné sur les obstacles plus subtils rencontrés par l’information à l’heure du numérique. Face à des réseaux sociaux qui structurent la société en « strates cognitives » et permettent à tout un chacun de s’improviser journaliste en divulguant son opinion, il a souligné le devoir du journaliste d’user de sa connaissance du sujet traité pour le présenter au plus grand nombre, avec le plus de fiabilité possible.
« Nous sommes ‘’numériquement’’ entourés par la communauté qui nous convient le mieux. Ce « chez-soi idéologique alimente ce que l’on pense déjà par des arguments supplémentaires, créant ainsi une sorte de bulle protectrice qui nous soulage du poids de la contrariété. Une fois cette famille de pensée créée, elle ne communique plus avec les autres, ce qui alimente le complotisme. Cela contredit l’idée même que l’on se fait de la République (et plus largement des systèmes démocratiques), qu’il devient alors important de redéfinir : soit il s’agit d’un lieu où l’on pratique la « politesse de l’esprit », c’est-à-dire que l’on s’adresse à tout le monde sans blesser personne, soit il s’agit d’un lieu douloureux pour l’intellect de chacun, c’est-à-dire que l’individu sera forcément exposé à l’adversité idéologique. La première est une conception idéalisée et passe par la censure et l’autocensure des médias, la seconde est à défendre et implique l’existence de médias libres. »
Des questions complexes aux enjeux passionnants face auxquelles Etienne Klein est resté résolument optimiste, voyant dans la problématique posée « une belle occasion de faire de la pédagogie », ajoutant qu’il « ne restait plus qu’à trouver les bons pédagogues qui se chargeront d’informer la population « . Un défi lancé à nos futurs journalistes. Un moment riche d’échanges et de questionnements que n’oublieront pas nos étudiants.